Le 31 juillet 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu public son nouveau communiqué de procédure relatif à la méthode de détermination des sanctions
1. Ce communiqué abroge et remplace le précédent communiqué du 16 mai 2011.
Ce nouveau communiqué tire toutes les conséquences de la transposition de la directive ECN+ (2019/1) par l’ordonnance du 26 mai 2021
2. L’objectif est de renforcer l’intégration et l’harmonisation européenne en matière de concurrence, ainsi que de permettre aux autorités de concurrence d’infliger des sanctions pécuniaires pouvant atteindre des montants dissuasifs.
I – LE DEPLAFONNEMENT DES SANCTIONS ENCOURUES PAR LES FEDERATIONS
L’Autorité prend acte du relèvement du plafond des sanctions encourues par les fédérations. Ainsi, les sanctions encourues par les fédérations peuvent atteindre :
- 10 % du chiffre d'affaires mondial total de la fédération lorsque l’infraction de la fédération n’a pas trait aux activités de ses membres ; ou
- 10 % de la somme du chiffre d'affaires mondial total réalisé par chaque membre actif sur le marché affecté par l'infraction de la fédération lorsque l’infraction de la fédération a trait aux activités de ses membres.
L’Autorité précise également au sein de son communiqué les modalités selon lesquelles celle-ci peut appeler certains adhérents à contribuer au paiement des sanctions infligées à la fédération en cas de défaillance de cette dernière. L’ordre suivant sera respecté :
- Seront d’abord actionnées les entreprises dont les représentants étaient membres des organes décisionnels de la fédération association ;
- Lorsque cela est nécessaire pour assurer le paiement intégral de l'amende, l’Autorité pourra également exiger le paiement du montant impayé de l'amende par tout membre de l'association qui était actif sur le marché sur lequel l'infraction a été commise ;
- Les entreprises pourront toutefois échapper à l’obligation de contribution lorsqu’elles démontrent qu'elles n'ont pas appliqué la décision incriminée de l'association et qui en ignoraient l'existence ou qui s'en sont activement désolidarisés avant l'ouverture de l'enquête.
II – UNE NOUVELLE METHODE DE DETERMINATION DES SANCTIONS
Le nouveau communiqué adapte la méthode de détermination des sanctions. La plupart de ces adaptations renforcent le caractère dissuasif et répressif des sanctions en cas d’infraction aux règles de concurrence. Il faut retenir les points suivants :
- Au titre de la détermination de la valeur des ventes prises en compte, l’Autorité intègre de nouveaux cas dans lesquels celle-ci pourra adapter sa méthode habituelle. Les marchés bifaces sont désormais visés, l’Autorité ayant alors la possibilité de tenir compte des ventes sur les marchés amont, aval et connexe.
- L’Autorité étend la liste des éléments pris en compte pour l’appréciation de la gravité des pratiques dans le cadre de la détermination des sanctions. Entres autre, seront désormais pris en compte l’impact négatif de l’infraction sur l’innovation, l’environnement, ou la diversité de l’offre. Il sera également tenu compte du fait que les victimes de l’infraction sont des acheteurs captifs ou que l’infraction concerne le secteur de la santé.
- L’Autorité ne prendra plus en compte le dommage à l’économie. Il s’agissait d’un facteur de modération des sanctions dès lors que le dommage était bien souvent limité.
- L’Autorité pourra, pour les pratiques les plus graves (abus de position dominante et certaines ententes horizontales), ajouter au montant de base une somme comprise entre 15 % et 25 % de la valeur des ventes afin de dissuader les entreprises de participer à ces pratiques.
- Le coefficient appliqué au montant de base afin de tenir compte de la durée de l’infraction devient extrêmement défavorable aux entreprises : désormais chaque année de participation à l’infraction sera pleinement prise en compte, alors que l’Autorité ne comptait qu’une demi-année au-delà de la première année de la participation. En deçà d’une année, la durée de l’infraction sera calculée prorata temporis.
- L’Autorité intègre de nouvelles circonstances aggravantes permettant par exemple de tenir compte des gains illicites réalisés grâce à l’infraction qui seraient supérieurs au montant de la sanction pécuniaire susceptible d’être prononcée.
- L’Autorité intègre de nouvelles circonstances atténuantes visant à favoriser la coopération à l’enquête en récompensant les entreprises qui coopèrent avec l’Autorité en allant au-delà des obligations auxquelles elles sont juridiquement soumises en dehors du champ d’application de la procédure de clémence. L’Autorité tiendra compte également des mesures de réparation mises en œuvre par l’entreprise en cours de procédure à l’égard des victimes de la pratique.
- Au titre de la récidive, l’Autorité aura désormais la possibilité de tenir compte du constat d’infraction réalisé par la Commission européenne ou une autorité nationale de concurrence d’un autre État membre de l’Union européenne.
L’Autorité peut toutefois décider, en motivant son choix, de s’écarter de cette méthode en raison des circonstances particulières d’une l’espèce.
III - REAGIR / ANTICIPER : EVALUER L’EFFICACITE ET, LE CAS ECHEANT, PREVOIR LE RENFORCEMENT DU PROGRAMME DE CONFORMITE « CONCURRENCE »
Ce renforcement des sanctions doit conduire les entreprises et les fédérations à s’assurer de l’efficacité du programme de conformité qu’elles ont mis en place. Cette question implique la mise en œuvre d’une méthodologie et de l’usage qui peut être fait des résultats de l’analyse.
Méthodologie d’évaluation de l’efficacité d’un programme de conformité aux règles de concurrence
La Commission européenne et les autorités nationales de concurrence ont émis des recommandations qui, si elles sont appliquées lors de la création et du suivi des programmes de conformité, assurent une protection de l’activité de l’entreprise ou de la fédération.
La méthodologie d’évaluation consiste à s’assurer, de façon pratique (et pas seulement documentaire), que ces recommandations sont bien présentes et suivies dans le cadre de la démarche de conformité.
Cette méthodologie implique ainsi :
- une vérification « documentaire » des outils de conformité,
- une évaluation de leur mise en œuvre concrète, au quotidien, à travers des entretiens avec quelques personnes clefs de la fédération,
- la proposition de recommandations adaptées afin, si besoin, d’améliorer l’efficacité du programme.
Les atouts d’une telle démarche pour la fédération et ses membres
Selon la méthodologie que nous avons mise en place, l’analyse permet la délivrance
- d’un rapport pratique sur l’adéquation du programme de conformité aux recommandations émises par les autorités de concurrence. Il comprend une évaluation, point par point, du programme, au moyen d’un code couleur et les améliorations à y apporter afin de le rendre plus efficace.
- d’une synthèse permettant, si besoin, une communication par l’entreprise ou la fédération (rapport annuel ou site internet), démontrant l’importance qu’elle accorde au respect des règles de concurrence.
Nos équipes sont mobilisées et restent à votre écoute. Pour toute question, n'hésitez pas à nous contacter.
Auteurs :
Frédéric PUEL
Alexandre MARESCAUX
1 Communiqué de l’Autorité de la concurrence relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires, 30 juillet 2021
2 Directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, OJ L 11, 14.1.2019, p. 3–33